COMPTABILITÉ COMPTES DE GESTION
Édition N° 133 du 09/06/1994, publié dans l’économiste, par Jaouad Chbani Idrissi
COMPTABILITÉ ET COMPTES DE GESTION : L’ACCÉLÉRATION DE LA SORTIE DES ÉTATS DE SYNTHÈSE
L’accélération de la production des états de synthèse, dans un contexte comptable nouveau, permettra de disposer plus rapidement des outils de gestion, surtout que la loi relative à la normalisation comptable entre en vigueur cette année COMPTABILITÉ COMPTES DE GESTION.
La normalisation comptable apporte un plus considérable aux entreprises marocaines, aussi bien pour les PME que pour les grandes entreprises. Les apports du nouveau plan touchent de nombreux domaines. mais surtout celui de la gestion.
Cependant, le Maroc, et en général la plupart des pays francophones, ne disposent pas d’une tradition de rapidité de production des états pour diverses raisons qui sont:
– le développement de l’information comptable et financière y est plus récent;
– l’emprise fiscale est très forte;
– les comptables méticuleux privilégient la précision au détriment du délai.
Les pressions externes liées à l’environnement (économique, fiscal et boursier) qui s’exercent sur l’entreprise, ajoutées à ses besoins internes de gestion, l’obligent de plus en plus à produire plus tôt ses comptes annuels.
I – Objectifs de l’accélération de la production des états de synthèse
L’accélération de la production des états de synthèse est recherchée pour répondre d’abord aux besoins de l’utilisation de l’information comptable et financière et ensuite à ceux de l’utilisation externe.
En ce sens, la production rapide de cette information permet:
– de disposer d’informations mensuelles récentes, actuelles c’est-à-dire une mesure aussi proche que possible de la réalité des performances, en terme de croissance, de marge, de productivité, de rentabilité etc.., permettant de prendre des décisions pertinentes et rapides;
– d’éviter de travailler sur des approximations de la comptabilité de gestion ou sur des informations de la comptabilité qui sont déjà dépassées car produites en retard;
– de diminuer le temps de réaction entre la connaissance de l’information réelle et la prise de décision;
– de disposer d’une comptabilité générale intégrée en tant qu’outil de gestion;
– de pouvoir communiquer périodiquement et sans retard, mal interprété, aux partenaires et aux tiers intéressés, des informations sur la situation réelle de l’entreprise (banque, fournisseurs, actionnaires).
Pour arriver à cette situation, il est nécessaire d’obtenir que:
– les données mensuelles de la comptabilité soient bouclées le plus tôt possible, soit le quatrième jour ouvrable et en fin d’année le septième (cas de IBM France);
– la comptabilité soit compétitive et synthétisable pour participer au dialogue de la gestion en temps réel nécessaire à l’entreprise.
Par ailleurs, l’accélération de la production des états de synthèse ne saurait être abordée sous le seul angle de l’organisation comptable proprement dit.
Elle implique la mise en œuvre de réformes touchant à la fois l’organisation générale, le système d’information de gestion et les procédures administratives et comptables.
II – Sources de retard
En général, on constate que les responsables sont rarement consultés lors de la mise en place des systèmes d’information de gestion.
La préoccupation comptable est de ce fait souvent absente dans les applications de gestion (personnel, approvisionnement, production, commercial..).
Alors que le système comptable devrait être considéré comme un outil de synthèse des implications comptables résultant des faits économiques générées par les systèmes de gestion. On voit coexister au sein de l’entreprise un système comptable et des applications de gestion sans aucune liaison entre eux.
Les fastidieux rapprochements
L’absence d’interfaces prive la comptabilité de générations comptables précieuses et oblige à des reprises d’écritures avec tout ce que cela comporte comme redondances, travaux fastidieux de recoupement, perte d’espace et de temps.
Une autre cause de retard résulte des raccordements mal étudiés et de l’absence de volonté de la direction générale d’intégrer la comptabilité de gestion et la comptabilité générale.
La méconnaissance de cette règle souvent en fin d’exercice à des acrobaties consistant en travaux fastidieux de pointage et de rapprochement dont les services comptables pourraient bien se passer en période d’arrêté.
III – Moyens d’accélération de la production des états
L’amélioration des délais de production des états de synthèse ne devrait pas être de la seule responsabilité des services comptables et financiers, puisque ces derniers ne jouent qu’un rôle de centralisation de l’information.
En effet, elle concerne et devrait être le souci de tous les membres de l’organisation. De plus l’action en faveur de l’amélioration des délais de production de l’information financière et comptable nécessite, en plus des actions à court terme telle l’application de la technique de préclôture, l’adoption d’une stratégie à long terme concernant l’organisation générale et en particulier les services comptable et financier sur le plan aussi bien opérationnel que fonctionnel.
Actions à long terme
L’amélioration de l’organisation ne peut être concevable sans une implication très forte de la direction générale. Celle-ci devrait mobiliser les énergies dans l’objectif:
– d’identifier et supprimer les points de blocage et de rétention suite à une revue critique des procédures comptables adoptées;
– d’établir un plan détaillé et standard d’arrêté des comptes;
– de fixer les responsabilités de chaque intervenant;
– d’imposer la discipline d’accélération en fixant des délais pour chaque type d’opération.
L’utilisation de l’outil informatique, garant de la rapidité, devrait être généralisée à l’ensemble des traitements de l’information tout en assurant sa performance, sa cohérence et son interactivité. Ceci n’est possible qu’aux conditions suivantes:
– généralisation des synthèses d’informations intégrées;
– introduction des données en une seule fois;
– validation des données à l’entrée pour éviter la propagation des erreurs en aval du traitement, à condition qu’il y ait certification de l’intégrité de l’information traitée.
Une entreprise qui déciderait de s’engager dans une action à long terme pour garantir l’accélération de la production d’information comptable et financière s’obligerait à concevoir un système d’information de gestion intégré.
Ce dernier doit être matriciel avec une comptabilité organisée en base de données interrogeables à la demande.
C’est en effet le moyen le plus sûr pour assurer l’unicité de l’information chiffrée circulant à l’intérieur et servant de support à la gestion.
De plus, la comptabilité doit disposer de moyens en termes d’architecture des systèmes, avec un véritable « département méthodes » permettant non seulement d’accélérer la production des états, mais généralement d’en fournir une analyse plus pertinente et d’augmenter fortement la productivité des services comptables.
Ainsi, la qualité de service rendu par la comptabilité s’améliore si le délai diminue entre la connaissance de l’information élémentaire par l’opérationnel et la restitution de l’information comptable pertinente de synthèse.
La réduction des délais d’arrêté de comptes passe par l’amélioration de clôture de compte, qui sera précédée d’une réflexion approfondie sur tous les aspects organisationnels de l’entreprise et apporte des améliorations: COMPTABILITÉ COMPTES DE GESTION
– à l’organisation;
– aux systèmes d’information;
– aux procédures;
– aux techniques d’analyses comptables et aux relations entre les services de gestion et la comptabilité.
Il sera opportun de réduire les délais d’arrêté de comptes en améliorant la technique de clôture de compte.
Actions ponctuelles et périodiques
L’accélération dépasse le cadre étroit de la fonction comptable qui constitue le dernier maillon de la chaîne de traitement des données de gestion.
Il revient donc aux responsables comptables de recourir à la technique des préclôtures en mettant en place un calendrier précis des opérations de clôtures périodiques (à périodicité mensuelle par exemple) avec les dates limites d’exécution.
Ainsi, la clôture mensuelle comportera par exemple:
– l’établissement de la balance préparatoire en J-5;
– l’analyse des comptes;
– la constitution des provisions et le traitement des anomalies;
– le traitement « au fil de l’eau » des transactions de J-5 à J;
– l’établissement de la balance provisoire; COMPTABILITÉ COMPTES DE GESTION
– l’établissement de la balance définitive à J+5.
Ainsi, chaque année l’arrêté de novembre servira-t-il de préclôture à l’arrêté annuel. Il sera procédé ainsi à une analyse très poussée des comptes à fin novembre et à une évaluation des différents événements qui risquent de se produire dans les derniers jours de l’exercice.
La fréquence des clôtures mensuelles banalisera la clôture annuelle.
La réduction du délai de production des résultats de l’entreprise concerne à la fois l’entreprise et la profession comptable. Toutefois, un certain nombre de difficultés liées à l’organisation, aux procédures adoptées et au système d’information inviteraient les entreprises à s’engager dans des actions à long et à court termes dans le but d’accélération de la production des états de synthèse.
Certification légale COMPTABILITÉ COMPTES DE GESTION
L’objectif d’accélération de la production des états de synthèse étant atteint, la certification légale de ces états peut prolonger le délai de leur publication. COMPTABILITÉ COMPTES DE GESTION
Cependant, l’accélération de la production et de la certification des comptes et par là celle de leur publication présente des limites pour les entreprises les plus performantes en terme de délai, (cas des grands groupes et des grandes entreprises internationales), et pour les auditeurs qui les suivent, il semble que de nouveaux progrès significatifs en terme de gain sur les délais de publication de comptes certifiés ne soient possibles qu’avec des changements plus radicaux et donc plus coûteux.
Jusqu’à quelle limite faudrait-il privilégier la rapidité plutôt que l’extrême précision? Et par là dans quelle mesure peut-on accélérer l’établissement et la certification des états de synthèse sans nuire aux principes de régularité, de clarté et d’image fidèle que doivent refléter les comptes?
La réponse à cette question passe par l’approfondissement des réformes juridiques, économiques et financières en cours et notamment: COMPTABILITÉ COMPTES DE GESTION
– le développement de la profession d’expertise comptable, du commissariat aux comptes et du rôle du conseil national de comptabilité;
– le développement de l’audit interne et la généralisation de l’audit externe;
– l’incitation des entreprises à s’ouvrir au marché financier;
– l’institution d’une législation commerciale plus adaptée à notre environnement.
Enfin la mise en place de ces mesures devra inciter les entreprises à installer:
– des structures d’organisation plus compétitives avec la généralisation du contrôle de gestion de toutes les fonctions, y compris la fonction comptable et financière;
– une efficacité plus rigoureuse des procédures de gestion adoptée;
– un système d’information intégré;
– un service d’audit interne dont les attributions renforcées en feront le garant de fiabilité de la pertinence et de la rapidité de la production des informations financières, comptables et de gestion.
J.C.I.
Expert-comptable diplômé d’Etat, Cabinet Chbani et Associés, membre du réseau JPA International
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